Philippe Jaroussky

The händel album
Philippe Jaroussky, contre-ténor et direction de l’orchestre Artaserse. Haendel, Airs d’opéra. CD Erato, 71’58’’, octobre 2017.

Consacrer tout un long CD à des airs d’opéra de Haendel est une opportunité de plus pour Philippe Jaroussky, à supposer que ce soit nécessaire, de faire une éblouissante démonstration de son talent. Dirigeant son orchestre Artaserse en totale complicité et harmonie avec ses musiciens, il propose un choix qui lui permet de donner pleine mesure aux accents de sa voix exceptionnelle et en même temps démontre le travail qu’il accomplit, ce qui lui permet de proposer une mosaïque très riche d’airs qu’il chante avec une apparente facilité, y compris les plus acrobatiques, et une grâce lumineuse, voire une réelle tendresse, lorsqu’il entend exprimer la douceur de la passion ou la mélancolie douloureuse.
On reste ébloui par les vocalises étourdissantes et les aigus spectaculaires d’airs tels que «Se parla del mio cor» tiré de «Giustino», ou de «Vile! se mi da vita» extrait de «Radamisto» ou encore l’extraordinaire «Rompo i lacci» tiré de «Flavio, Re de’Longobardia ». On ressent une émotion intense en l’écoutant chanter avec une sorte d’empathie douce des airs qui en deviennent réellement bouleversants, comme l’ «Ombra cara», tiré de «Radamisto» ou encore le «Stille amare», extrait de «Tolomeo, Re d’Egitto» ou encore le douloureux «Deggio morire, o stelle» de «Siroe, Re di Persia». Alors que les films-peplum qui sont légion sur l’Antiquité donnent souvent une vision très simplifiée des héros dont ils narrent les aventures, Philippe Jaroussky leur donne une consistance réelle, qu’il leur fasse exprimer la rage, la douleur, l’amour. Peu importe, ils deviennent réels, présents, parce que crédibles.
Le chanteur a ce talent rare de donner l’impression qu’il s’exprime naturellement; il a su éviter les pièges de la virtuosité d’épate dans laquelle trop de chanteurs tombent lorsqu’ils choisissent de proposer un CD tout entier consacré à des airs connus pour leur difficulté technique, qu’ils maîtrisent certes, mais peut-être sans aller au-delà. On applaudit la prouesse, puis on passe à autre chose.
L’auditeur n’a qu’une envie c’est de l’écouter encore et encore, parce que, à chaque fois, on découvre un nouveau trésor. Au fil des années, ceux qui ont été touchés dès le début par ses interprétations le voient devenir encore meilleur, sans changer. Il met ses qualités exceptionnelles au service des compositeurs dans un partage sans réserve avec ses auditeurs.

Danielle Anex-Cabanis


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Publié le 02/11/2017 à 13:35, mis à jour le 04/05/2020 à 16:01.