Cité de la Musique
> 9 octobre

Les Arts Florissants - Paul Agnew

La paix en ces rivages
Photos Sandrine Expilly
Livre I des Madrigaux de Monteverdi.

C’est au cœur d’un cycle dédié aux larmes par la Cité de la Musique, devant une salle comble, que Paul Agnew et 5 chanteurs des Arts Florissants poursuivent leur tournée mondiale avec l’intégrale qu’ils donneront sur trois ans des Madrigaux du poète de la musique baroque, Claudio Monteverdi.
A la source de l’opéra, ces courtes pièces vocales privilégient cette rencontre du texte avec une musique et sont un théâtre où se jouent la vie, l’amour et la mort.
Le premier livre de madrigaux du Crémonais s’inscrit dans une tradition bien établie. Sa trop courte durée ne peut convenir à un concert, aussi la première partie de celui-ci était consacrée aux origines et donc aux maîtres qui permirent à Monteverdi à l’âge de 19 ans de révolutionner la musique comme nul autre.
Les plus grands poètes furent dès la seconde partie du XVIe siècle les grands inspirateurs des compositeurs. Parmi eux l’on trouve, Guarini et Le Tasse dont les précieux textes Ardo si, ma non t’amo et Ardi e gela ont illustré cette évolution dans ce nouvel art de dire la force des sentiments.
Tandis que se profile ce tout jeune homme qui rêve et brûle de ses premiers feux et qui va plus loin que ses maîtres. Cinq voix viennent chez lui murmurer plus encore joies et chagrins, et il ose déjà quelques formules plus audacieuses. Il conclu son 1e livre, en reprenant certes ces deux poèmes en conclusion, mais va plus loin dans la joute poétique, rajoutant un troisième texte, une contrariposta, à la proposition et à la riposte, Arsi e alsi a mia voglia.

Les Arts Florissants se montrent sous la direction amicale de Paul Agnew des chantres admirables, qui nous permettent de percevoir, ce passage de la polyphonie vers une sensibilité plus intime, mais encore en quête d’un idéal sonore.
Favorisant la ligne, les timbres magnifiques des 6, puis 5 chanteurs à tour de rôle, dans Monteverdi, s’unissent voluptueusement. La distribution est parfaitement choisie et équilibrée. Ici pas de contre-ténor mais un contralto, au timbre de velours sombre et suave, Marie Gautrot. Les voix des soprani, Miriam Allan et Hannah Morrison, surgissent de la nuit, comme la frêle flamme d’une bougie sensible aux ombres. Les timbres des deux ténors Sean Clayton et Paul Agnew s’enrichissent mutuellement. Le premier rayonne quand le second nous séduit par sa sensuelle beauté. Quand à la basse Lisandro Abadie, sa voix souple et profonde, vient avec celle du contralto souligner ces obscurs objets de désirs qui n’osent encore rompre l’apparente harmonie d’aimer.

Ce premier concert, révèle sans aucun doute une intégrale à venir qui pourrait bien faire date, tant ici les interprètes avec humilité, intelligence et élégance, partagent avec le public, cette musique à nulle autre pareille.

Monique Parmentier

Le concert peut être réécouté jusqu’au 9 avril 2012 sur le site internet de la Cité de la musique: http://www.citedelamusiquelive.tv/Concert/0975583.html
Publié le 18/10/2011 à 08:53, mis à jour le 26/01/2019 à 19:35.