Sabine Devieilhe

Mozart Les sœurs Weber
Photographies Molina Visuals/Erato
Sabine Devieilhe, Raphaël Pichon, Pygmalion, Mozart, The Weber Sisters, CD Erato 2015 (72’26).

Célébrer par le chant trois des quatre filles Weber relève d’une amoureuse initiative, qui associe biographie et musicologie. Construit comme une sorte d’opéra en trois actes avec prologue, le disque se focalise tour à tour sur Aloysia la première aimée, puis Josepha la moins connue, enfin Constanze, épouse et veuve de Mozart.
Même si des compositions pour orchestre viennent varier le récital, l’héroïne de cette fête musicale s’avère Sabine Devieilhe, dont l’interprétation éblouissante et raffinée enchante. Des airs virtuoses écrits pour Aloysia Weber, brillante cantatrice, on retiendra le prodigieux Popoli di Tessaglia avec son récitatif dramatique que suit une étourdissante prière aux dieux. Mozart y accumule les difficultés dont Sabine Devieilhe se joue avec autorité et subtilité. Plus tard, il confiera à Josephale rôle de la Reine de la Nuit: la chanteuse française en offre le second air Der Hölle rache. Raphaël Pichonle prend à un rythme d’enfer qui aurait pu mettre en périltoute autre soprano que Sabine Devieilhe: sa souveraine furie ne manque ni de feu, ni d’aigus et le chant, même dans ces zones stratosphériques, reste d’une beauté inouïe. Constanze a évidemment inspiré maints chefs d’œuvre mozartiens. Raphaël Pichon et Sabine Devieilhe ont essentiellement retenu le Et incarnatus est de la Messe en ut mineur composée en 1783 un an après le mariage. C’est le sommet d’un disque qui n’en manque pas: profondeur, lyrisme, souplesse, intériorité, clarté, tout contribue à créer l’émotion.
L’ensemble Pygmalion et son chef donnent à ce bouquet savamment composé de seize pièces seschaudes couleurs et son parfum sensuel. Les émousse à peine une dernière plage qui détonne. Etait-il nécessaire de se «prêter au jeu d’imaginer un accompagnement» (sic) pour telle pièce ou de proposer des «arrangements»? Sans doute pas. Mais c’est péché véniel, eu égard à la qualité de cet enregistrement où l’on sent, ô miracle, palpiter le cœur même de Mozart.

Jean Jordy
Publié le 21/03/2016 à 21:33, mis à jour le 26/01/2019 à 19:35.