David Fray, piano
Cornelius Meister, direction

Cornelius Meister, directeur du Staatsorchester Stuttgart, avait commandé pour son orchestre une œuvre au compositeur français Régis Campo. N’ayant pu la créer à Stuttgart durant la pandémie, il l’a créé ce soir avec l’Orchestre National du Capitole de Toulouse. Cette œuvre donc, Art Spirit, mobilisant un grand orchestre comprenant percussions, harpe et piano, hommage à l’ouvrage de Robert Henri The Art Spirit qui était le livre de chevet du cinéaste David Lynch, engendre une pulsation organique scandée par la percussion omniprésente, inspirée de la musique électronique, dans une atmosphère à la fois «planante» et électrisante. Très impliqué, Cornelius Meister obtient de son orchestre d’un soir la meilleure traduction des pertinentes expérimentations de l’auteur, présent ce soir, qui se hâta de rejoindre ce chef sur la scène pour le triomphe mérité venant de l’auditoire conquis.
David Fray se lance alors dans le concerto pour piano en la mineur de Robert Schumann. D’une sonorité aussi effusive que tendre, dessinant des phrases au galbe harmonieux, créant des accents à la verve inépuisable, il y exprime tout le long le lyrisme le plus échevelé. La précision sonore de l’accompagnement de Cornelius Meister est exemplaire pour la relance du mouvement engendré par son soliste qui lors du bis, un extrait de la quatrième suite française de Jean Sébastien Bach, manifeste le même élan, la même profondeur.
Enfin, la deuxième symphonie de Johannes Brahms retentit d’un souffle épique inextinguible. Là encore, sens du mouvement et climat d’urgence créent une énergie qui emporte tout sur son passage. La tension rythmique est palpable mais l’orchestre n’oublie jamais de chanter pour exalter le sentiment de liberté et amoindrir le sens du tragique qui imprègnent la partition. Nous assistons là à un véritable voyage spirituel.

Jean-Félix Marquette