Paris 1900
L'Art du… Hautbois, Cornet et Flûte
L’Art du Hautbois. Alexandre Gattet, Hautbois, Laurent Wagschal. piano. Œuvres de Godart, Saint-Saëns, Pierné, de Bréville, Koechlin, Vierne, Gaubert, Franck, Fauré. CD Indésens
L’Art du Cornet. Eric Aubier, cornet, Laurent Wagschal, piano. Œuvres de Balay, Pares, Hüe, Pennequin, Gaubert, Charlier, Ropartz, Andrieu, Colombo, Arban. CD Indésens
L’Art de la Flûte. Vincent Lucas, hautbois, Laurent Wagschal. piano. Œuvres de Debussy, Bonis, Fauré, Roussel, Ravel, Caplet, Chaminade. CD Indésens
Largement plus de trois heures de musique française, rare, singulière, de découvertes aux climats colorés et variés, voilà ce que propose la collection Paris 1900 élaborée par le label Indésens autour de la musique de chambre pour instruments à vents émanant de compositeurs connus ou oubliés. Coincée entre deux guerres, - ce qu’elle ignore - l’époque se voue à l’enthousiasme, à l’énergie, à l’innovation dans tous les domaines, et notamment artistique, fertile en mouvements, en avancées. Et Paris s’avère un creuset de création, d’audaces, de recherches et de défis superbement illustrés ici. Ouvrant un plus large pan de l’histoire de la musique que celle du titre, les œuvres pour chacun des trois instruments sont accompagnées du piano par Laurent Wagschal, toujours mobile, alerte, malicieux, incessamment complice.
De l’Art du Hautbois, généreux florilège de pages ciselées, nous retenons les Scènes écossaises de de Godard, au délicat pittoresque, la Sonatine à l’Allegretto troublant signée Saint-Saëns, une Fantaisie pastorale de Paul Pierné (petit- cousin de Gabriel) un peu convenue mais séduisante, deux Pièces discrètement lyriques de Philippe Gaubert dont Laurent Wagschal et Vincent Lucas à la flûte ont enregistré pour le même label la musique de chambre dédiée. Nous découvrons aussi Pierre Onfroy de Bréville, élève et biographe de César Franck (dont on écoute à la suite une Pièce V finement épurée ), auteur d’une Sonate pour Hautbois racée, tenue mais vivante, fraîche. Alexandre Gattet et son hautbois «charmeur, virtuose et mystérieux» parent de poésie élégante ces pages dont la succession ne lasse pas, tant ainsi jouées elles ont de charme et d’attrait. Dans l’Art du Cornet (à pistons), instrument éminemment populaire, à la sonorité chaleureuse, émergent des pièces de concours (Balay, Hüe, Pennequin, Charlier, Andrieu) à l’éclatante virtuosité, servies avec onctuosité par le trompettiste/cornettiste Eric Aubier: il se joue des difficultés (Parès, Pennequin, Arban… ), transformant ces pages évocatrices d’un passé suranné (Andrieu, Colombo) en parcours de plaisir partagé. Le mélomane curieux s’enchantera à leur écoute. Ainsi du Cantabile et Scherzetto nostalgique de Gaubert (que nous retrouvons ici), de l’émouvant Andante de Ropartz ou de l’ébouriffante Fantaisie (bien dénommée) brillante d’Arban, chef de file de l’école française de cornet. Avec le copieux et mélodieux Art de la Flûte, nous revoilà en pays connu qui accueille Debussy, Fauré, Roussel, Ravel. Les Six épigraphes antiques du premier exaltent les sonorités dorées de l’instrument en une série de miniatures mystérieuses et sereines dont Vincent Lucas avec Laurent Wagschal, subtil coloriste, est le peintre et le poète. Leur répondent en écho sept pages de Roussel comme ailées, suspendues, aux humeurs changeantes, mais toujours pures et profondes. On saluera la part belle faite dans ce programme à deux compositrices, Mel Bonis avec une Sonate où un piano courtois fait sa cour à une flûte fantasque et Cécile Cheminade et son Concertino, vif, voire espiègle, doté d’une cadence où étincelle Vincent Lucas.
Les trois CD comprenant des œuvres originales ou des arrangements se signalent par la cohérence de leur interprétation: la direction artistique et les instrumentistes privilégient une forme de légèreté de jeu que n’entravent ni la nécessaire rigueur ni la vigueur souriante. Les pages semblent jaillir, pures et souples, revivifiées. Remercions Gabrielle Oliveira-Guyon, productrice à France-Musique, pour ses notices fourmillant d’informations sur l’époque, l’histoire des instruments, les pages retenues. Elles composent le guide érudit et clair d’un ensemble original, où la nostalgie convoquée devient école buissonnière de la découverte. Cette collection audacieuse explore avec des interprètes fervents un répertoire inégalement connu trop rarement exploité. Elle ressuscite ainsi un temps à la bouillonnante richesse musicale qui ne cesse de nous captiver.
Jean Jordy
L’Art du Cornet. Eric Aubier, cornet, Laurent Wagschal, piano. Œuvres de Balay, Pares, Hüe, Pennequin, Gaubert, Charlier, Ropartz, Andrieu, Colombo, Arban. CD Indésens
L’Art de la Flûte. Vincent Lucas, hautbois, Laurent Wagschal. piano. Œuvres de Debussy, Bonis, Fauré, Roussel, Ravel, Caplet, Chaminade. CD Indésens
Largement plus de trois heures de musique française, rare, singulière, de découvertes aux climats colorés et variés, voilà ce que propose la collection Paris 1900 élaborée par le label Indésens autour de la musique de chambre pour instruments à vents émanant de compositeurs connus ou oubliés. Coincée entre deux guerres, - ce qu’elle ignore - l’époque se voue à l’enthousiasme, à l’énergie, à l’innovation dans tous les domaines, et notamment artistique, fertile en mouvements, en avancées. Et Paris s’avère un creuset de création, d’audaces, de recherches et de défis superbement illustrés ici. Ouvrant un plus large pan de l’histoire de la musique que celle du titre, les œuvres pour chacun des trois instruments sont accompagnées du piano par Laurent Wagschal, toujours mobile, alerte, malicieux, incessamment complice.
De l’Art du Hautbois, généreux florilège de pages ciselées, nous retenons les Scènes écossaises de de Godard, au délicat pittoresque, la Sonatine à l’Allegretto troublant signée Saint-Saëns, une Fantaisie pastorale de Paul Pierné (petit- cousin de Gabriel) un peu convenue mais séduisante, deux Pièces discrètement lyriques de Philippe Gaubert dont Laurent Wagschal et Vincent Lucas à la flûte ont enregistré pour le même label la musique de chambre dédiée. Nous découvrons aussi Pierre Onfroy de Bréville, élève et biographe de César Franck (dont on écoute à la suite une Pièce V finement épurée ), auteur d’une Sonate pour Hautbois racée, tenue mais vivante, fraîche. Alexandre Gattet et son hautbois «charmeur, virtuose et mystérieux» parent de poésie élégante ces pages dont la succession ne lasse pas, tant ainsi jouées elles ont de charme et d’attrait. Dans l’Art du Cornet (à pistons), instrument éminemment populaire, à la sonorité chaleureuse, émergent des pièces de concours (Balay, Hüe, Pennequin, Charlier, Andrieu) à l’éclatante virtuosité, servies avec onctuosité par le trompettiste/cornettiste Eric Aubier: il se joue des difficultés (Parès, Pennequin, Arban… ), transformant ces pages évocatrices d’un passé suranné (Andrieu, Colombo) en parcours de plaisir partagé. Le mélomane curieux s’enchantera à leur écoute. Ainsi du Cantabile et Scherzetto nostalgique de Gaubert (que nous retrouvons ici), de l’émouvant Andante de Ropartz ou de l’ébouriffante Fantaisie (bien dénommée) brillante d’Arban, chef de file de l’école française de cornet. Avec le copieux et mélodieux Art de la Flûte, nous revoilà en pays connu qui accueille Debussy, Fauré, Roussel, Ravel. Les Six épigraphes antiques du premier exaltent les sonorités dorées de l’instrument en une série de miniatures mystérieuses et sereines dont Vincent Lucas avec Laurent Wagschal, subtil coloriste, est le peintre et le poète. Leur répondent en écho sept pages de Roussel comme ailées, suspendues, aux humeurs changeantes, mais toujours pures et profondes. On saluera la part belle faite dans ce programme à deux compositrices, Mel Bonis avec une Sonate où un piano courtois fait sa cour à une flûte fantasque et Cécile Cheminade et son Concertino, vif, voire espiègle, doté d’une cadence où étincelle Vincent Lucas.
Les trois CD comprenant des œuvres originales ou des arrangements se signalent par la cohérence de leur interprétation: la direction artistique et les instrumentistes privilégient une forme de légèreté de jeu que n’entravent ni la nécessaire rigueur ni la vigueur souriante. Les pages semblent jaillir, pures et souples, revivifiées. Remercions Gabrielle Oliveira-Guyon, productrice à France-Musique, pour ses notices fourmillant d’informations sur l’époque, l’histoire des instruments, les pages retenues. Elles composent le guide érudit et clair d’un ensemble original, où la nostalgie convoquée devient école buissonnière de la découverte. Cette collection audacieuse explore avec des interprètes fervents un répertoire inégalement connu trop rarement exploité. Elle ressuscite ainsi un temps à la bouillonnante richesse musicale qui ne cesse de nous captiver.
Jean Jordy
Publié le 18/05/2022 à 18:55, mis à jour le 18/05/2022 à 18:56.