Bach, Chopin, Influences
Laurence Oldak, piano
J-S Bach Partita n°2 BWV 826 et autres œuvres. Chopin, Sonate n°3 opus 58. C. P. E Bach, Andante de la sonate Wq 65/32. Laurence Oldak, piano. CD Klarthe Records
Née à Toulouse, élève du Conservatoire de la Ville rose avant d’entrer au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, chambriste, concertiste, pédagogue, attachée à la création contemporaine, Laurence Oldak a gravé un disque où des œuvres de Scriabine et de Kirill Zaborov (né en 1970) entraient en «dialogue», titre de l’album. C’est avec une intention analogue qu’elle couple aujourd’hui des œuvres de Bach et de Chopin, compositeurs qu’on n’associerait pas spontanément. Rémi Stricker dans le livret d’accompagnement justifie par maints rapprochements informés «ce parcours insolite», selon ses propres termes. Mais c’est à l’auditeur de découvrir les «influences», les correspondances secrètes que le jeu rigoureux de la pianiste tisse ici dans ces moments musicaux subtilement agencés. La Partita n°2 BWV 826, peu conventionnelle, ouvre l’album. La Suite de danses à six temps comprend une Sinfonia initiale, ici un peu appliquée, d’audacieux Rondeaux et pour conclure, non pas la gigue attendue, mais un Capriccio étincelant dans sa fantaisie rythmique. C’est cette liberté formelle qui a, n’en doutons pas, séduit la pianiste: sa lecture nette, franche, sans esbroufe ni précipitation sait proposer des envolées, des échappées moins retenues, une expressivité sensible, même si dans la délicate Sarabande, jouée comme à pas de loup, un manque de couleurs estompe le propos. Les trois Préludes et fugues choisis (BWV 858, 881et 543), bénéficient de la même lisibilité, ne souffrent d’aucune sécheresse, sonnent avec une élégante précision.
Busoni, grand pianiste, musicien novateur, a transcrit pour le clavier maintes œuvres de Bach, dont la célèbre Chaconne pour violon de la deuxième Partita. Laurence Oldak a choisi l’adaptation du choral Ich ruf zu Dir, Herr Jesu Christ BWV 639. Elle en livre une interprétation remplie de ferveur. Quand, après le somptueux Bach transcrit par Liszt (BWV 543) résonnent les premières notes de la Sonate n°3 opus 58 de Chopin, on est très surpris par l’absence de hiatus, par l’évidente continuité du parcours musical. Non que cette œuvre rappelle celles de Bach, mais parce que la pianiste a su nous accompagner de page en page jusqu’au compositeur romantique, servi avec un lyrisme contrôlé, magistralement structuré (Quel admirable Largo !). Il ne s’agit pas d’influences, mais plutôt de prolongement comme un torrent devient rivière qui se mue en fleuve. Ce qui, dans un récital coupé par la pose d’un entracte, apparaîtrait comme juxtaposition ou pure construction intellectuelle coule ici de source. Et on ne s’étonne pas que l’Andate con tenerezza de C. P. E. Bach conclue l’album. Moins pour passer du père au fils via Liszt et Chopin, que pour nouer dans un même geste pianistique forme «classique» et épanchement romantique.
Insolite, ce parcours? Sans doute, mais réfléchi, intelligent, finement balisé et interprété avec une sobre probité qui sait convaincre et toucher.
Jean Jordy
Laurence Oldak joue Prélude et Fugue en la mineur de Bach, BWV 543
Née à Toulouse, élève du Conservatoire de la Ville rose avant d’entrer au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, chambriste, concertiste, pédagogue, attachée à la création contemporaine, Laurence Oldak a gravé un disque où des œuvres de Scriabine et de Kirill Zaborov (né en 1970) entraient en «dialogue», titre de l’album. C’est avec une intention analogue qu’elle couple aujourd’hui des œuvres de Bach et de Chopin, compositeurs qu’on n’associerait pas spontanément. Rémi Stricker dans le livret d’accompagnement justifie par maints rapprochements informés «ce parcours insolite», selon ses propres termes. Mais c’est à l’auditeur de découvrir les «influences», les correspondances secrètes que le jeu rigoureux de la pianiste tisse ici dans ces moments musicaux subtilement agencés. La Partita n°2 BWV 826, peu conventionnelle, ouvre l’album. La Suite de danses à six temps comprend une Sinfonia initiale, ici un peu appliquée, d’audacieux Rondeaux et pour conclure, non pas la gigue attendue, mais un Capriccio étincelant dans sa fantaisie rythmique. C’est cette liberté formelle qui a, n’en doutons pas, séduit la pianiste: sa lecture nette, franche, sans esbroufe ni précipitation sait proposer des envolées, des échappées moins retenues, une expressivité sensible, même si dans la délicate Sarabande, jouée comme à pas de loup, un manque de couleurs estompe le propos. Les trois Préludes et fugues choisis (BWV 858, 881et 543), bénéficient de la même lisibilité, ne souffrent d’aucune sécheresse, sonnent avec une élégante précision.
Busoni, grand pianiste, musicien novateur, a transcrit pour le clavier maintes œuvres de Bach, dont la célèbre Chaconne pour violon de la deuxième Partita. Laurence Oldak a choisi l’adaptation du choral Ich ruf zu Dir, Herr Jesu Christ BWV 639. Elle en livre une interprétation remplie de ferveur. Quand, après le somptueux Bach transcrit par Liszt (BWV 543) résonnent les premières notes de la Sonate n°3 opus 58 de Chopin, on est très surpris par l’absence de hiatus, par l’évidente continuité du parcours musical. Non que cette œuvre rappelle celles de Bach, mais parce que la pianiste a su nous accompagner de page en page jusqu’au compositeur romantique, servi avec un lyrisme contrôlé, magistralement structuré (Quel admirable Largo !). Il ne s’agit pas d’influences, mais plutôt de prolongement comme un torrent devient rivière qui se mue en fleuve. Ce qui, dans un récital coupé par la pose d’un entracte, apparaîtrait comme juxtaposition ou pure construction intellectuelle coule ici de source. Et on ne s’étonne pas que l’Andate con tenerezza de C. P. E. Bach conclue l’album. Moins pour passer du père au fils via Liszt et Chopin, que pour nouer dans un même geste pianistique forme «classique» et épanchement romantique.
Insolite, ce parcours? Sans doute, mais réfléchi, intelligent, finement balisé et interprété avec une sobre probité qui sait convaincre et toucher.
Jean Jordy
Laurence Oldak joue Prélude et Fugue en la mineur de Bach, BWV 543
Publié le 20/10/2020 à 23:56, mis à jour le 12/01/2022 à 21:50.