Les Pléiades, sextuor à cordes
Beethoven, Schönberg
Beethoven, Symphonie n°6, transcription de Michaël Gotthardt, Schönberg, La Nuit transfigurée, Les Pléiades, sextuor à cordes. CD NoMadMusic 71’14.
Dans la mythologie grecque les Pléiades étaient sept sœurs. Ce sont aujourd’hui six musiciennes, c’est ainsi, qui composent la constellation d’un ensemble de cordes issu de l’orchestre Les Siècles. A leur programme, deux œuvres majeures du XIXe siècle: à son aurore (1808) la Sixième symphonie de Beethoven dans une transcription pour sextuor à cordes, à son crépuscule La Nuit transfigurée de Schönberg (1899).
Toute transcription est une réduction, propre à permettre à l’origine à de petites formations d’amateurs aguerris de s’approprier et de diffuser les pages majeures de la musique symphonique. Celle pour sextuor à cordes qu’a élaborée dès 1810 Michaël Gotthardt Fischer du chef d’œuvre de Beethoven relève d’une exigence technique et d’une profondeur musicale qui surprennent agréablement l’auditeur. Et l’interprétation qu’en propose ce singulier enregistrement en fait miroiter toutes les subtiles trouvailles. Réduction ici ne signifie ni appauvrissement, ni assèchement, mais recréation, épuration, mise en valeur de structures, de linéaments qui charpentent l’œuvre et que pallie au sens primitif du terme la somptueuse orchestration originale. N’attendons pas la richesse, la variété de la palette sonore, le chromatisme des timbres: pas de bois, pas de cuivres, pas de timbales en effet. Mais guettons, goûtons les effets de surprise, l’inventivité, l’intelligence de la transposition chambriste qui permet par exemple à un jeune public - les Pléiades sont friandes des concerts pédagogiques - de se voir proposer la chance et le bonheur de découvrir la symphonie de Beethoven, sa fraîcheur, ses pastorales péripéties, ses tendres émotions. Et très vite le charme agit. L’andante du deuxième mouvement respire, avec la douceur délicate qui convient à la «scène au bord du ruisseau». Nous apprécions sans réserve le soin que les musiciennes prennent à marier les sonorités tout en en distinguant les saveurs, le relief qu’elles savent donner - bien servies par une prise de son claire - à l’étagement des strates instrumentales, toujours aérées. Ici ou là évidemment l’orchestre beethovénien fait défaut, sans doute dans la joyeuse assemblée de paysans qui manque de danseurs et de rires. Mais curieusement pas dans l’Orage qui loin d’inquiéter, rafraîchit et apaise et qu’on entend comme une plaisante récréation bienvenue. On se prend souvent à cette écoute à sourire et à s’émerveiller devant la tonicité, la légèreté, la sereine énergie qui révèlent un Beethoven plus intime, moins grandiose, mais autrement touchant, oserait-on dire schubertien. Cette découverte n’est pas le moindre mérite de cet enregistrement que complète la Nuit transfigurée écrite elle directement pour sextuor à cordes. Le livret contient le texte et la traduction du poème de Richard Dehmel: le compositeur viennois suit le sublime échange entre deux êtres, et leur souffle in fine «se mêle dans les airs». Évitant tout sentimentalisme – auquel Schönberg, amoureux, pouvait être sensible - , les Pléiades accompagnent les amants, suscitant les climats nocturnes ambiants aussi bien que la tension puis la tendresse fiévreuse de l’extase finale. Fidèles à leur parti pris, les interprètes privilégient ici encore les lignes de force, l’austère architecture au détriment peut-être d’une plus lumineuse sensualité. Ce choix confirme la cohérence de l’enregistrement, la pertinence du programme, parcours musical de Beethoven au jeune Schönberg, et la qualité de ce nouvel ensemble de chambre qui promet de belles aventures musicales.
Jean Jordy
Dans la mythologie grecque les Pléiades étaient sept sœurs. Ce sont aujourd’hui six musiciennes, c’est ainsi, qui composent la constellation d’un ensemble de cordes issu de l’orchestre Les Siècles. A leur programme, deux œuvres majeures du XIXe siècle: à son aurore (1808) la Sixième symphonie de Beethoven dans une transcription pour sextuor à cordes, à son crépuscule La Nuit transfigurée de Schönberg (1899).
Toute transcription est une réduction, propre à permettre à l’origine à de petites formations d’amateurs aguerris de s’approprier et de diffuser les pages majeures de la musique symphonique. Celle pour sextuor à cordes qu’a élaborée dès 1810 Michaël Gotthardt Fischer du chef d’œuvre de Beethoven relève d’une exigence technique et d’une profondeur musicale qui surprennent agréablement l’auditeur. Et l’interprétation qu’en propose ce singulier enregistrement en fait miroiter toutes les subtiles trouvailles. Réduction ici ne signifie ni appauvrissement, ni assèchement, mais recréation, épuration, mise en valeur de structures, de linéaments qui charpentent l’œuvre et que pallie au sens primitif du terme la somptueuse orchestration originale. N’attendons pas la richesse, la variété de la palette sonore, le chromatisme des timbres: pas de bois, pas de cuivres, pas de timbales en effet. Mais guettons, goûtons les effets de surprise, l’inventivité, l’intelligence de la transposition chambriste qui permet par exemple à un jeune public - les Pléiades sont friandes des concerts pédagogiques - de se voir proposer la chance et le bonheur de découvrir la symphonie de Beethoven, sa fraîcheur, ses pastorales péripéties, ses tendres émotions. Et très vite le charme agit. L’andante du deuxième mouvement respire, avec la douceur délicate qui convient à la «scène au bord du ruisseau». Nous apprécions sans réserve le soin que les musiciennes prennent à marier les sonorités tout en en distinguant les saveurs, le relief qu’elles savent donner - bien servies par une prise de son claire - à l’étagement des strates instrumentales, toujours aérées. Ici ou là évidemment l’orchestre beethovénien fait défaut, sans doute dans la joyeuse assemblée de paysans qui manque de danseurs et de rires. Mais curieusement pas dans l’Orage qui loin d’inquiéter, rafraîchit et apaise et qu’on entend comme une plaisante récréation bienvenue. On se prend souvent à cette écoute à sourire et à s’émerveiller devant la tonicité, la légèreté, la sereine énergie qui révèlent un Beethoven plus intime, moins grandiose, mais autrement touchant, oserait-on dire schubertien. Cette découverte n’est pas le moindre mérite de cet enregistrement que complète la Nuit transfigurée écrite elle directement pour sextuor à cordes. Le livret contient le texte et la traduction du poème de Richard Dehmel: le compositeur viennois suit le sublime échange entre deux êtres, et leur souffle in fine «se mêle dans les airs». Évitant tout sentimentalisme – auquel Schönberg, amoureux, pouvait être sensible - , les Pléiades accompagnent les amants, suscitant les climats nocturnes ambiants aussi bien que la tension puis la tendresse fiévreuse de l’extase finale. Fidèles à leur parti pris, les interprètes privilégient ici encore les lignes de force, l’austère architecture au détriment peut-être d’une plus lumineuse sensualité. Ce choix confirme la cohérence de l’enregistrement, la pertinence du programme, parcours musical de Beethoven au jeune Schönberg, et la qualité de ce nouvel ensemble de chambre qui promet de belles aventures musicales.
Jean Jordy
Publié le 06/10/2020 à 18:52, mis à jour le 12/01/2022 à 21:50.