Ensemble Ouranos, quintette à vent
Ligeti, Nielsen, Dvorak
Ensemble Ouranos, Œuvres de Ligeti, Nielsen, Dvorak. CD NoMadMusic 61’55
Pour un quintette d’instruments à vent, prendre pour nom celui de la divinité primordiale Ouranos, étymologiquement Celui qui fait pleuvoir, révèle un tempérament et une énergie que manifeste audacieusement ce premier enregistrement. Composé de trois œuvres aptes à exalter pour chaque vent sa couleur, son intensité et sa sonorité propres et à les fondre dans un élan commun, le programme original s’ouvre par Six Bagatelles de György Ligeti (1953), qu’on n’entend pas tous les jours. Cette recherche autour des timbres et des rythmes apparait surtout comme un jeu, savant et brillant, où se déploient en se délectant les cinq complices. Ils donnent ainsi peut-être la clé de leur collaboration exemplaire, l’amour des sons, de leur distinction, de leur appariement, de leur communion. Le Quintette de Carl Nielsen, créé en 1922, dont la notice nous apprend qu’elle serait «l’une des pièces du compositeur les plus jouées au monde», s’avère d’une facture traditionnelle. Ses trois mouvements, dont le virtuose et parfois solennel dernier avec variations, témoignent des goûts du musicien danois pour les timbres singuliers des instruments à vent. L’interprétation à la fois tendre et savoureuse de l’Ensemble Ouranos aurait séduit ce grand admirateur de musique classique, et singulièrement de Mozart. Chacun y exprime avec délicatesse, générosité et humour cette «pulsion de la Vie» que Nielsen revendiquait dans sa musique. On la retrouve, puissante et libre, inventive, dans la dernière œuvre de l’enregistrement. Le groupe de virtuoses français propose une créative transcription pour quintette à vent due à David Walter du célèbre quatuor à cordes dit Américain (1894) d’Anton Dvorak. L’allegro initial y gagne en rondeur et en espièglerie, sans perdre en vivacité et en équilibre. La nostalgie du pays aimé imprègne le splendide Lento dont l’émouvante clarinette entonne la cantilène reprise par le cor en l’élargissant, alors que la flûte, le hautbois et le basson isolent ou confondent l’entrelacs de leur accompagnement: c’est une nouvelle œuvre, autrement belle, comme dilatée, que nous découvrons, dont les couleurs plus sombres approfondissent les sentiments et les effets. Les deux derniers mouvements, vivace chacun à sa façon, combinent les chants mêlés de l’Amérique et de la Bohème natale dans une effervescente joyeuse que l’Ensemble Ouranos maitrise avec une alacrité délectable et un sens aigu de la pulsation rythmique.
Nommons pour les saluer et les embrasser dans le même éloge les cinq acteurs de ce CD vivifiant: Mathilde Calderini, flûte, Philibert Perrine, hautbois, Amaury Viduvier, clarinette, Rafael Angster, basson, Nicolas Ramez, cor. L’Ensemble Ouranos ou, pour notre bonheur, ceux qui font pleuvoir les sons.
Jean Jordy
Écouter un extrait sur YouTube:
Pour un quintette d’instruments à vent, prendre pour nom celui de la divinité primordiale Ouranos, étymologiquement Celui qui fait pleuvoir, révèle un tempérament et une énergie que manifeste audacieusement ce premier enregistrement. Composé de trois œuvres aptes à exalter pour chaque vent sa couleur, son intensité et sa sonorité propres et à les fondre dans un élan commun, le programme original s’ouvre par Six Bagatelles de György Ligeti (1953), qu’on n’entend pas tous les jours. Cette recherche autour des timbres et des rythmes apparait surtout comme un jeu, savant et brillant, où se déploient en se délectant les cinq complices. Ils donnent ainsi peut-être la clé de leur collaboration exemplaire, l’amour des sons, de leur distinction, de leur appariement, de leur communion. Le Quintette de Carl Nielsen, créé en 1922, dont la notice nous apprend qu’elle serait «l’une des pièces du compositeur les plus jouées au monde», s’avère d’une facture traditionnelle. Ses trois mouvements, dont le virtuose et parfois solennel dernier avec variations, témoignent des goûts du musicien danois pour les timbres singuliers des instruments à vent. L’interprétation à la fois tendre et savoureuse de l’Ensemble Ouranos aurait séduit ce grand admirateur de musique classique, et singulièrement de Mozart. Chacun y exprime avec délicatesse, générosité et humour cette «pulsion de la Vie» que Nielsen revendiquait dans sa musique. On la retrouve, puissante et libre, inventive, dans la dernière œuvre de l’enregistrement. Le groupe de virtuoses français propose une créative transcription pour quintette à vent due à David Walter du célèbre quatuor à cordes dit Américain (1894) d’Anton Dvorak. L’allegro initial y gagne en rondeur et en espièglerie, sans perdre en vivacité et en équilibre. La nostalgie du pays aimé imprègne le splendide Lento dont l’émouvante clarinette entonne la cantilène reprise par le cor en l’élargissant, alors que la flûte, le hautbois et le basson isolent ou confondent l’entrelacs de leur accompagnement: c’est une nouvelle œuvre, autrement belle, comme dilatée, que nous découvrons, dont les couleurs plus sombres approfondissent les sentiments et les effets. Les deux derniers mouvements, vivace chacun à sa façon, combinent les chants mêlés de l’Amérique et de la Bohème natale dans une effervescente joyeuse que l’Ensemble Ouranos maitrise avec une alacrité délectable et un sens aigu de la pulsation rythmique.
Nommons pour les saluer et les embrasser dans le même éloge les cinq acteurs de ce CD vivifiant: Mathilde Calderini, flûte, Philibert Perrine, hautbois, Amaury Viduvier, clarinette, Rafael Angster, basson, Nicolas Ramez, cor. L’Ensemble Ouranos ou, pour notre bonheur, ceux qui font pleuvoir les sons.
Jean Jordy
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Publié le 23/01/2019 à 20:22, mis à jour le 04/05/2020 à 16:42.