Teatro Massimo, Palerme
> 30 juin
Viva Mascagni
Cavalleria rusticana, Rapsodia satanica
Photographies par Rosellina Garbo et Franco Lannino
Cavalleria rusticana est toujours couplé à un second opéra bref. Le Teatro Massimo de Palerme en Sicile réussit une association plus rare et pertinente, célébrant le compositeur Mascagni. Il marie dans cette production signée Marina Bianchi le célèbre mélodrame lyrique à une œuvre cinématographique. Rapsodia satanica, film de cinquante minutes environ, variation brillante sur le thème de Faust a été tourné en 1914 par un jeune cinéaste Nino Oxilia, né en 1889 et mort au front en 1917, l’année de la sortie du film. Une vieille comtesse signe un pacte avec le diable: elle redeviendra jeune si elle renonce à l’amour. L’histoire finira mal! Le lecteur curieux peut voir cette belle œuvre esthétisante sur la Toile et entendra la très efficace partition composée par… Mascagni précisément. La projection du film est accompagnée par la musique jouée en direct par l’Orchestre du théâtre, dirigé par Fabrizio Maria Carminati dans une interprétation dramatique et lyrique soutenue.
La représentation de l’opéra décuple les émotions. Sur la vaste et profonde scène de ce splendide théâtre, se déploie un beau décor de place de village, la taverne de Mamma Lucia à gauche, l’entrée de l’église à droite où évoluent, dans des costumes sobres, parsemés de taches de couleurs subtiles, les chœurs de paysans et de fidèles. La scène de la prière pascale collective ou la déploration finale se révèlent d’une intensité qui tient autant à la ferveur des voix qu’à la dramaturge, habile à composer des tableaux vivants. Le plateau est dominé par la Santuzza bouleversante de Sonia Ganassi. Toute de noir vêtue, volontaire, farouche, elle lutte désespérément pour reconquérir Turridu, mettant au service de cette incarnation l’expérience d’une riche carrière de mezzo soprano, la solidité d’une voix sombre capable d’aigus puissants, un engagement dramatique qui fuit le pathos et laisse surgir l’intensité de l’émotion, telle une éruption de feu. C’est magnifique, fort, puissant, profondément humain et soulève une houle d’applaudissements. Face à elle, le Turridu du ténor turc Murat Karahan fait valoir une voix éclatante qui ne s’embarrasse pas de nuances, même si les adieux à la mère témoignent d’une volonté d’alléger et d’émouvoir. Gevorg Hakobyan campe un Alfio viril, au timbre riche et tranchant face à la Lola sensuelle de Martina Belli. La tessiture d’alto du rôle de Mamma Lucia ne pose aucun problème à Agostina Smimmero, aussi efficace face à Santuzza que devant son fils. Cette distribution sans faille est superbement soutenue par un orchestre aussi à l’aise dans les épanchements lyriques que lors les acmés dramatiques qui rythment une partition servie avec intensité par Fabrizio Maria Carminati. L’intermezzo, le prélude, la fin abrupte, l’attention aux chanteurs, la construction de l’action lyrique témoignent des évidentes qualités d’un chef de répertoire précis, amoureux d’une musique trop souvent et peu finement décriée. L’ensemble constitue une soirée forte, originale, pleine d’émotion, un peu à l’image d’une ville fascinante, vivante et tonique.
Jean Jordy
Voir Rapsodia Satanica
(Nino Oxilia, 1917) sur YouTube:
La représentation de l’opéra décuple les émotions. Sur la vaste et profonde scène de ce splendide théâtre, se déploie un beau décor de place de village, la taverne de Mamma Lucia à gauche, l’entrée de l’église à droite où évoluent, dans des costumes sobres, parsemés de taches de couleurs subtiles, les chœurs de paysans et de fidèles. La scène de la prière pascale collective ou la déploration finale se révèlent d’une intensité qui tient autant à la ferveur des voix qu’à la dramaturge, habile à composer des tableaux vivants. Le plateau est dominé par la Santuzza bouleversante de Sonia Ganassi. Toute de noir vêtue, volontaire, farouche, elle lutte désespérément pour reconquérir Turridu, mettant au service de cette incarnation l’expérience d’une riche carrière de mezzo soprano, la solidité d’une voix sombre capable d’aigus puissants, un engagement dramatique qui fuit le pathos et laisse surgir l’intensité de l’émotion, telle une éruption de feu. C’est magnifique, fort, puissant, profondément humain et soulève une houle d’applaudissements. Face à elle, le Turridu du ténor turc Murat Karahan fait valoir une voix éclatante qui ne s’embarrasse pas de nuances, même si les adieux à la mère témoignent d’une volonté d’alléger et d’émouvoir. Gevorg Hakobyan campe un Alfio viril, au timbre riche et tranchant face à la Lola sensuelle de Martina Belli. La tessiture d’alto du rôle de Mamma Lucia ne pose aucun problème à Agostina Smimmero, aussi efficace face à Santuzza que devant son fils. Cette distribution sans faille est superbement soutenue par un orchestre aussi à l’aise dans les épanchements lyriques que lors les acmés dramatiques qui rythment une partition servie avec intensité par Fabrizio Maria Carminati. L’intermezzo, le prélude, la fin abrupte, l’attention aux chanteurs, la construction de l’action lyrique témoignent des évidentes qualités d’un chef de répertoire précis, amoureux d’une musique trop souvent et peu finement décriée. L’ensemble constitue une soirée forte, originale, pleine d’émotion, un peu à l’image d’une ville fascinante, vivante et tonique.
Jean Jordy
Voir Rapsodia Satanica
(Nino Oxilia, 1917) sur YouTube:
Publié le 05/07/2018 à 14:05, mis à jour le 04/05/2020 à 16:35.