> 22 – 24 juillet
Les Journées Lagraulet du Gers
Muza Rubackyté (photo A. Huc de Vaubert) et Hélène Delalande
Pour la 11ème fois, Pierre Stortti réussissait à réunir près de 300 personnes pour se régaler de musique et selon la tradition de bonne cuisine, traditionnellement servie sous les platanes, mais cette fois-ci à couvert compte tenu d’un temps exécrable, qui n’a toutefois pas altéré la bonne humeur des festivaliers.
Dans la jolie église du village transformée en salle de concert, on démarre par un moment de pur bonheur. La pianiste Muza Rubackyte, une de ses meilleurs interprètes nous offre un récital chatoyant et subtil des superbes Années de pèlerinage de Liszt. Avec la première année, elle nous entraîne en Suisse où Liszt et Marie d’Agoult vivent leur passion, malgré une certaine réprobation sociale. Elle nous fait vivre intensément par un jeu très raffiné, loin de certains débordements auxquels cèdent des pianistes qui confondent bruit et intensité, aussi bien des sentiments, ainsi dans le Mal du pays, qu’elle évoque une nature changeante, tour à tour aimable et hostile, par exemple dans le très beau Lac de Wallenstadt. La deuxième année nous conduit en Italie et c’est une éblouissante combinaison de thèmes poétiques avec Dante et Pétrarque et de lieux, en particulier Venise et Naples. Très présente, habitée par ce qu’elle joue, Muza extrait autant d’elle-même que du piano une musique envoûtante, c’est une sorte de deuxième vie magnifique, dont on aimerait qu’elle ne s’arrête pas.
La suite des évènements confirme qu’il n’est pas interdit de rêver puisqu’en duo avec Marc Laborde qui évoque Liszt , le franciscain tsigane, elle illustre la conférence par des extraits musicaux appropriés, n’hésitant pas à apporter son propre éclairage. L’exposé est intelligent et drôle, mettant en avant données érudites, témoignages de contemporains et anecdotes amusantes, présentées avec un brio que les adhérents d’UtMiSol connaissent bien chez leur Président.
Après le déjeuner, le grand baryton Jean-Philippe Lafont donne une master class publique, qui permet d’apprécier des jeunes talents et plus encore de découvrir une technique pédagogique éblouissante. Le Maître pousse les juniors qu’il accompagne à trouver le meilleur d’eux-mêmes et on les entend, on les voit progresser en intégrant ses conseils et critiques fermes tout en étant dispensés avec une immense affection. «Tu peux y arriver», c’est le leimotiv…
On se retrouve en fin d’après-midi pour écouter des airs d’opéras et d’opérettes interprétés par Marena Balinova, une soprano bulgare qui, après des problèmes de santé, veut relancer sa carrière et prend des cours auprès de Jeanne Berbié, une habituée du festival auquel elle a participé en donnant en son temps une master class. A suivre…
Après un apéritif sous les platanes, grâce à un rayon de soleil inespéré, l’église fait le plein pour accueillir les voix et musiques tsiganes de l’ensemble Urs Karpatz. On se promène dans toutes les errances des gens du voyage et si le groupe propose quelques pièces qui correspondent au répertoire le plus connu, à savoir le hongrois avec ses célèbres csardas ou une relecture de deux danses hongroises de Brahms, il propose des morceaux plus originaux au cours desquels, chanteurs et instrumentistes ont l’occasion de faire découvrir des sonorités et des rythmes inattendus des bords de la mer Noire ou du nord de l’Inde, ou encore d’Ukraine et d’Espagne. Le public ne boude pas son plaisir et entend bien le continuer en achetant CD et DVD proposés à la sortie par les artistes.
Le programme annoncé du dimanche était prometteur, mais on est passé à un niveau que je n’hésite pas à qualifier d’exceptionnel et remarquable. Marc Laborde et les chanteurs avaient concocté un programme associant 4 des jeunes talents entraînés par Jean-Philippe Lafont, lui même rejoint par des chanteurs confirmés. Charlotte Kouby et Cindy Virazels proposent un délicieux duo de Marceline et Suzanne, suivi du duo Zurga-Nadir des Pêcheurs de perles proposés par Pierre-Emmanuel Roubet et Riccardo Certi. Ils ont su mettre à profit les leçons de leur maître et les entendre est un vrai plaisir. Hélène Delalande mezzo propose un extrait de Bajazet et le non son piu des Noces, avant d’interpréter le célèbre Connais-tu le pays du Mignon de Thomas. Elle interprète avec Sandra Liz-Carthagena le célèbre duo des fleurs de Madame Butterfly et toutes deux donnent une vision très épurée de cette mélodie qui pourrait glisser dans le mièvre et qui est ici parfaite. Quant à Kevin Amiel, il propose un très beau Pourquoi me réveiller du Werther de Massenet. A trois, Sandra Liz-Carthagena, Jean-Philippe Lafont et Kevin Amiel offrent une prestation remarquable avec trois extraits de Tosca: le terrible duo de Scarpia et Tosca, puis le sublime Vissi d’arte de Tosca et E lucevan le Stelle de Mario. Le maître est Scarpia, on est à Rome, on est pénétré de méchanceté et de noirceur. Force, violence, haine s’expriment de manière magistrale face à Tosca et Mario. Le drame est noué, tout le monde va mourir. On est physiquement pris par cette triple interprétation en tous points remarquables.
Aux côtés et avec les chanteurs, Marc Laborde introduit chaque pièce et sa prestation lui vaut des applaudissements mérités tout comme ceux que recueille la fidèle et remarquable accompagnatrice des chanteurs, la pianiste Eloise Urbain. Non contente d’être les compositeurs successifs comme la présente joliment Marc Laborde, elle propose en brillant intermezzo une version jazzy de la Marche turque qui lui vaut un tonnerre d’applaudissements mérités.
Quel excellent week-end, nous sommes tous partants pour la douzième édition!
Danielle Anex-Cabanis
Dans la jolie église du village transformée en salle de concert, on démarre par un moment de pur bonheur. La pianiste Muza Rubackyte, une de ses meilleurs interprètes nous offre un récital chatoyant et subtil des superbes Années de pèlerinage de Liszt. Avec la première année, elle nous entraîne en Suisse où Liszt et Marie d’Agoult vivent leur passion, malgré une certaine réprobation sociale. Elle nous fait vivre intensément par un jeu très raffiné, loin de certains débordements auxquels cèdent des pianistes qui confondent bruit et intensité, aussi bien des sentiments, ainsi dans le Mal du pays, qu’elle évoque une nature changeante, tour à tour aimable et hostile, par exemple dans le très beau Lac de Wallenstadt. La deuxième année nous conduit en Italie et c’est une éblouissante combinaison de thèmes poétiques avec Dante et Pétrarque et de lieux, en particulier Venise et Naples. Très présente, habitée par ce qu’elle joue, Muza extrait autant d’elle-même que du piano une musique envoûtante, c’est une sorte de deuxième vie magnifique, dont on aimerait qu’elle ne s’arrête pas.
La suite des évènements confirme qu’il n’est pas interdit de rêver puisqu’en duo avec Marc Laborde qui évoque Liszt , le franciscain tsigane, elle illustre la conférence par des extraits musicaux appropriés, n’hésitant pas à apporter son propre éclairage. L’exposé est intelligent et drôle, mettant en avant données érudites, témoignages de contemporains et anecdotes amusantes, présentées avec un brio que les adhérents d’UtMiSol connaissent bien chez leur Président.
Après le déjeuner, le grand baryton Jean-Philippe Lafont donne une master class publique, qui permet d’apprécier des jeunes talents et plus encore de découvrir une technique pédagogique éblouissante. Le Maître pousse les juniors qu’il accompagne à trouver le meilleur d’eux-mêmes et on les entend, on les voit progresser en intégrant ses conseils et critiques fermes tout en étant dispensés avec une immense affection. «Tu peux y arriver», c’est le leimotiv…
On se retrouve en fin d’après-midi pour écouter des airs d’opéras et d’opérettes interprétés par Marena Balinova, une soprano bulgare qui, après des problèmes de santé, veut relancer sa carrière et prend des cours auprès de Jeanne Berbié, une habituée du festival auquel elle a participé en donnant en son temps une master class. A suivre…
Après un apéritif sous les platanes, grâce à un rayon de soleil inespéré, l’église fait le plein pour accueillir les voix et musiques tsiganes de l’ensemble Urs Karpatz. On se promène dans toutes les errances des gens du voyage et si le groupe propose quelques pièces qui correspondent au répertoire le plus connu, à savoir le hongrois avec ses célèbres csardas ou une relecture de deux danses hongroises de Brahms, il propose des morceaux plus originaux au cours desquels, chanteurs et instrumentistes ont l’occasion de faire découvrir des sonorités et des rythmes inattendus des bords de la mer Noire ou du nord de l’Inde, ou encore d’Ukraine et d’Espagne. Le public ne boude pas son plaisir et entend bien le continuer en achetant CD et DVD proposés à la sortie par les artistes.
Le programme annoncé du dimanche était prometteur, mais on est passé à un niveau que je n’hésite pas à qualifier d’exceptionnel et remarquable. Marc Laborde et les chanteurs avaient concocté un programme associant 4 des jeunes talents entraînés par Jean-Philippe Lafont, lui même rejoint par des chanteurs confirmés. Charlotte Kouby et Cindy Virazels proposent un délicieux duo de Marceline et Suzanne, suivi du duo Zurga-Nadir des Pêcheurs de perles proposés par Pierre-Emmanuel Roubet et Riccardo Certi. Ils ont su mettre à profit les leçons de leur maître et les entendre est un vrai plaisir. Hélène Delalande mezzo propose un extrait de Bajazet et le non son piu des Noces, avant d’interpréter le célèbre Connais-tu le pays du Mignon de Thomas. Elle interprète avec Sandra Liz-Carthagena le célèbre duo des fleurs de Madame Butterfly et toutes deux donnent une vision très épurée de cette mélodie qui pourrait glisser dans le mièvre et qui est ici parfaite. Quant à Kevin Amiel, il propose un très beau Pourquoi me réveiller du Werther de Massenet. A trois, Sandra Liz-Carthagena, Jean-Philippe Lafont et Kevin Amiel offrent une prestation remarquable avec trois extraits de Tosca: le terrible duo de Scarpia et Tosca, puis le sublime Vissi d’arte de Tosca et E lucevan le Stelle de Mario. Le maître est Scarpia, on est à Rome, on est pénétré de méchanceté et de noirceur. Force, violence, haine s’expriment de manière magistrale face à Tosca et Mario. Le drame est noué, tout le monde va mourir. On est physiquement pris par cette triple interprétation en tous points remarquables.
Aux côtés et avec les chanteurs, Marc Laborde introduit chaque pièce et sa prestation lui vaut des applaudissements mérités tout comme ceux que recueille la fidèle et remarquable accompagnatrice des chanteurs, la pianiste Eloise Urbain. Non contente d’être les compositeurs successifs comme la présente joliment Marc Laborde, elle propose en brillant intermezzo une version jazzy de la Marche turque qui lui vaut un tonnerre d’applaudissements mérités.
Quel excellent week-end, nous sommes tous partants pour la douzième édition!
Danielle Anex-Cabanis
Publié le 02/08/2011 à 09:24, mis à jour le 26/01/2019 à 19:35.