Théâtre du Capitole
> 26 janvier
Parsifal
Photographies par Cosimo Mirco Magliocca
Dernier opéra achevé de Wagner, Parsifal est une œuvre d’une très grande richesse musicale, mais en même temps complexe tant s’y entrechoquent des concepts religieux et philosophiques souvent confus qui ouvrent la porte à diverses interprétations par le metteur en scène.
L’orchestre et le chœur du Capitole, ainsi que le chœur de Montpellier magistralement dirigés par Frank Beermann, font une prestation remarquable. Le tempo est parfait, l’équilibre sonore parfaitement maîtrisé constituant une sorte d’écrin pour la mise en valeur des solistes. Je m’arrêterai plus particulièrement sur les prestations des quatre solistes principaux. Nikolai Schukoff est un Parsifal (rôle qu’il chante depuis un certain temps) splendide. Il donne corps à son personnage aussi bien lorsqu’il est perdu, ne réussissant pas son initiation, que lorsqu’il touche enfin au but, sa voix chaude, qu’il module avec finesse, fait de lui un remarquable interprète de ce personnage compliqué. Sophie Koch, pour qui Kundry est une prise de rôle, donne une vision exceptionnelle d’émotion de ce personnage double, démon qui se rachète pour accéder finalement à la rédemption. Elle est Kundry, donc elle est rusée, séductrice, violente, porteuse de haine, avant d’incarner une sorte de lumière. Le rôle est non seulement lourd par sa longueur mais il est difficile, tant il repose sur une construction dans laquelle phrasé littéraire et musical ne correspondent délibérément pas, ce qui rend le travail beaucoup plus difficile, car l’artificiel doit paraître naturel. Sophie Koch domine cette difficulté avec une élégance remarquable. Le public toulousain l’apprécie depuis plusieurs années et lui fera plusieurs ovations. Matthias Goerne en Amfortas et Peter Rose en Gurnemanzsont tous les deux excellents. La douleur d’Amfortas tout comme son désespoir sont palpables et le chanteur, applaudi récemment dans un récital au Capitole, donne à son personnage toute sa profondeur dramatique. Il a de la puissance dans son désarroi et ce qui est une sorte de renaissance – dire résurrection serait exagéré – apparaît comme une marche vers la lumière.
Wagner a fait de Gurnemanz un bavard impénitent, ce qui le dédramatise. Peter Rose se sort habilement de ce que l’on pourrait taxer de disqualification pour donner progressivement plus de consistance à son personnage enfin percé à jour.
S’il n’y a pas assez d’éloges pour saluer l’ensemble des musiciens, c’est une autre paire de manches avec la mise en scène. Sans aller jusqu’à siffler comme l’on fait beaucoup de spectateurs fort remontés, je n’hésite pas à dire ma déception. Il ne s’agit pas de reconstituer un moyen âge d’opérette, mais au moins de servir la grandeur musicale de l’œuvre. Or, ce n’est rien de tout cela. Des costumes ternes à part la combinaison blanche de Parsifal et la robe de Kundry au deuxième acte, dans un décor minimaliste n’évoquent rien. Les jeux de néon sont assez vite ennuyeux dans leur pseudo dimension cabalistique et le dernier acte où tout se joue entre des panneaux de leds n’en est pas plus limpide, n’étant pas lumineux du tout! C’est d’autant plus regrettable que le propos de Wagner est décodable, transférable dans le temps s’il y a lieu. D’ailleurs le propos de présentation du metteur en scène n’éclaire rien. Si l’on peut justifier des allègements, pour des raisons économiques mais aussi pour des raisons de choix d’approche, cela n’a de sens que si la cohésion du tout est bien assurée, ce n’est pas le cas ici. C’est prétentieux et somme toute arrogant. On revient toujours au débat de la hiérarchie entre musique et scène. Le metteur en scène rêve d’être le numéro un, il ne l’est jamais lorsqu’il veut se donner le premier rôle.
Dommage, il y avait tous les ingrédients pour une réussite, atteinte au 2e acte seulement: la mise en scène y est intelligente, vraiment au service de la musique.
Danielle Anex-Cabanis
L’orchestre et le chœur du Capitole, ainsi que le chœur de Montpellier magistralement dirigés par Frank Beermann, font une prestation remarquable. Le tempo est parfait, l’équilibre sonore parfaitement maîtrisé constituant une sorte d’écrin pour la mise en valeur des solistes. Je m’arrêterai plus particulièrement sur les prestations des quatre solistes principaux. Nikolai Schukoff est un Parsifal (rôle qu’il chante depuis un certain temps) splendide. Il donne corps à son personnage aussi bien lorsqu’il est perdu, ne réussissant pas son initiation, que lorsqu’il touche enfin au but, sa voix chaude, qu’il module avec finesse, fait de lui un remarquable interprète de ce personnage compliqué. Sophie Koch, pour qui Kundry est une prise de rôle, donne une vision exceptionnelle d’émotion de ce personnage double, démon qui se rachète pour accéder finalement à la rédemption. Elle est Kundry, donc elle est rusée, séductrice, violente, porteuse de haine, avant d’incarner une sorte de lumière. Le rôle est non seulement lourd par sa longueur mais il est difficile, tant il repose sur une construction dans laquelle phrasé littéraire et musical ne correspondent délibérément pas, ce qui rend le travail beaucoup plus difficile, car l’artificiel doit paraître naturel. Sophie Koch domine cette difficulté avec une élégance remarquable. Le public toulousain l’apprécie depuis plusieurs années et lui fera plusieurs ovations. Matthias Goerne en Amfortas et Peter Rose en Gurnemanzsont tous les deux excellents. La douleur d’Amfortas tout comme son désespoir sont palpables et le chanteur, applaudi récemment dans un récital au Capitole, donne à son personnage toute sa profondeur dramatique. Il a de la puissance dans son désarroi et ce qui est une sorte de renaissance – dire résurrection serait exagéré – apparaît comme une marche vers la lumière.
Wagner a fait de Gurnemanz un bavard impénitent, ce qui le dédramatise. Peter Rose se sort habilement de ce que l’on pourrait taxer de disqualification pour donner progressivement plus de consistance à son personnage enfin percé à jour.
S’il n’y a pas assez d’éloges pour saluer l’ensemble des musiciens, c’est une autre paire de manches avec la mise en scène. Sans aller jusqu’à siffler comme l’on fait beaucoup de spectateurs fort remontés, je n’hésite pas à dire ma déception. Il ne s’agit pas de reconstituer un moyen âge d’opérette, mais au moins de servir la grandeur musicale de l’œuvre. Or, ce n’est rien de tout cela. Des costumes ternes à part la combinaison blanche de Parsifal et la robe de Kundry au deuxième acte, dans un décor minimaliste n’évoquent rien. Les jeux de néon sont assez vite ennuyeux dans leur pseudo dimension cabalistique et le dernier acte où tout se joue entre des panneaux de leds n’en est pas plus limpide, n’étant pas lumineux du tout! C’est d’autant plus regrettable que le propos de Wagner est décodable, transférable dans le temps s’il y a lieu. D’ailleurs le propos de présentation du metteur en scène n’éclaire rien. Si l’on peut justifier des allègements, pour des raisons économiques mais aussi pour des raisons de choix d’approche, cela n’a de sens que si la cohésion du tout est bien assurée, ce n’est pas le cas ici. C’est prétentieux et somme toute arrogant. On revient toujours au débat de la hiérarchie entre musique et scène. Le metteur en scène rêve d’être le numéro un, il ne l’est jamais lorsqu’il veut se donner le premier rôle.
Dommage, il y avait tous les ingrédients pour une réussite, atteinte au 2e acte seulement: la mise en scène y est intelligente, vraiment au service de la musique.
Danielle Anex-Cabanis
Publié le 03/02/2020 à 21:22, mis à jour le 12/01/2022 à 21:51.