Gautier Capuçon
Intuition
Intuition, Gautier Capuçon, violoncelle, Jérôme Ducros piano, Orchestre de chambre de Paris, Douglas Boyd direction. Œuvres de Paganini, Saint-Saëns, Tchaïkovski, Massenet, Popper, Fauré, Joplin, Rachmaninov, Piazzolla, Dvorak, Elgar, Sollima, Ducros. CD Erato 81’44. Bonus DVD21’.
Avec Intuition, Gautier Capuçon signe son disque le plus personnel, celui qui reflète la palette la plus sensible et la plus intime de sa personnalité musicale. Mais que l’auditeur ne s’attende pas à une exposition ostentatoire de l’artiste. Le terme même d’Intuition qui donne son titre à l’album se révèle assez flou et énigmatique pour pallier, au pur sens du mot, le caractère égotiste de l’entreprise. Il faut l’entendre comme un parcours à travers des œuvres qui jalonnent son itinéraire d’interprète et réveille en lui, et souvent en nous, échos et émotions. L’auditeur prend plaisir à le suivre comme un compagnon ami et sûr dont on connait le lumineux talent, l’intégrité, la passion de jouer. Ne cherchons pas d’autre fil directeur à ce programme varié, peut-être un peu trop, que celui de l’offrande et du partage. C’est d’ailleurs ce qu’on éprouve toujours en écoutant, en concert ou au disque, Gautier Capuçon: sa générosité, la sensualité du son, l’ardeur et dans le même temps une pudeur, le sens du mystère. Personnel, le programme l’est absolument par le choix des pages choisies qui ouvre largement la palette des sentiments et l’horizon des compositeurs, de Massenet à Piazzolla, de Fauré à Scott Joplin, de Saint Saëns à Rachmaninov et Dvorak. On lit à l’envi que le violoncelliste, d’œuvre en œuvre, fait parcourir des paysages nouveaux et son clip promotionnel sur les cimes enneigées (Le Cygne) semblerait confirmer cette perception. Mais le disque s’avère plus profond que ce pittoresque touristique. Au stade de sa carrière, Gautier Capuçon n’est pas homme, n’est pas artiste, à jouer les organisateurs de voyages à travers les œuvres. Ce qu’il construit ici ce sont bien les Mémoires d’une âme (Hugo). L’entreprise s’avère ainsi plus haute, plus exigeante, plus profonde. On ne sait pas au juste ce que Gautier Capuçon nous dit de lui-même dans cet album. Ce que l’on éprouve c’est qu’il se livre tout entier, y compris avec ses mystères et ses retenues, dans toutes ses facettes d’artiste au service des plus grands. Il ne s’agit donc pas pour l’auditeur de choisir ce qui l’émeut ou qu’il aime ici: Fauré tendre mais tenu, Dvorak mélancolique, Sollima planant, Méditation de Thaïs sombre et sobre, Vocalise au chant intense, Elfentanz hallucinant, Tchaïkovski méditatif, Variations de Paganini étourdissantes, et si amplement lyriques, Tango charnel, ardent, enveloppant, ragtime vibrant et coloré de Joplin, Cant dels ocells en hommage à Casals, tout est interprété avec fougue ou délicatesse, noblesse ou humour, tendresse ou force, ardeur et élégance. Mais il convient de saluer, au-delà de la performance musicale du violoncelliste et de ses accompagnateurs, dont le pianiste Jérôme Ducros, compositeur d’un Encore endiablé puis cantabile, l’audace d’un propos qui n’a rien d’impudique et qui relève de la plus haute et subtile exigence artistique et sans doute spirituelle. Qu’on ne s’y trompe pas! En nous offrant son disque le plus intime, il s’adresse à la part la plus intime de nous-même. Et c’est cette proximité qui le rend si attachant.
Jean Jordy
Écoutez un extrait sur YouTube:
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Avec Intuition, Gautier Capuçon signe son disque le plus personnel, celui qui reflète la palette la plus sensible et la plus intime de sa personnalité musicale. Mais que l’auditeur ne s’attende pas à une exposition ostentatoire de l’artiste. Le terme même d’Intuition qui donne son titre à l’album se révèle assez flou et énigmatique pour pallier, au pur sens du mot, le caractère égotiste de l’entreprise. Il faut l’entendre comme un parcours à travers des œuvres qui jalonnent son itinéraire d’interprète et réveille en lui, et souvent en nous, échos et émotions. L’auditeur prend plaisir à le suivre comme un compagnon ami et sûr dont on connait le lumineux talent, l’intégrité, la passion de jouer. Ne cherchons pas d’autre fil directeur à ce programme varié, peut-être un peu trop, que celui de l’offrande et du partage. C’est d’ailleurs ce qu’on éprouve toujours en écoutant, en concert ou au disque, Gautier Capuçon: sa générosité, la sensualité du son, l’ardeur et dans le même temps une pudeur, le sens du mystère. Personnel, le programme l’est absolument par le choix des pages choisies qui ouvre largement la palette des sentiments et l’horizon des compositeurs, de Massenet à Piazzolla, de Fauré à Scott Joplin, de Saint Saëns à Rachmaninov et Dvorak. On lit à l’envi que le violoncelliste, d’œuvre en œuvre, fait parcourir des paysages nouveaux et son clip promotionnel sur les cimes enneigées (Le Cygne) semblerait confirmer cette perception. Mais le disque s’avère plus profond que ce pittoresque touristique. Au stade de sa carrière, Gautier Capuçon n’est pas homme, n’est pas artiste, à jouer les organisateurs de voyages à travers les œuvres. Ce qu’il construit ici ce sont bien les Mémoires d’une âme (Hugo). L’entreprise s’avère ainsi plus haute, plus exigeante, plus profonde. On ne sait pas au juste ce que Gautier Capuçon nous dit de lui-même dans cet album. Ce que l’on éprouve c’est qu’il se livre tout entier, y compris avec ses mystères et ses retenues, dans toutes ses facettes d’artiste au service des plus grands. Il ne s’agit donc pas pour l’auditeur de choisir ce qui l’émeut ou qu’il aime ici: Fauré tendre mais tenu, Dvorak mélancolique, Sollima planant, Méditation de Thaïs sombre et sobre, Vocalise au chant intense, Elfentanz hallucinant, Tchaïkovski méditatif, Variations de Paganini étourdissantes, et si amplement lyriques, Tango charnel, ardent, enveloppant, ragtime vibrant et coloré de Joplin, Cant dels ocells en hommage à Casals, tout est interprété avec fougue ou délicatesse, noblesse ou humour, tendresse ou force, ardeur et élégance. Mais il convient de saluer, au-delà de la performance musicale du violoncelliste et de ses accompagnateurs, dont le pianiste Jérôme Ducros, compositeur d’un Encore endiablé puis cantabile, l’audace d’un propos qui n’a rien d’impudique et qui relève de la plus haute et subtile exigence artistique et sans doute spirituelle. Qu’on ne s’y trompe pas! En nous offrant son disque le plus intime, il s’adresse à la part la plus intime de nous-même. Et c’est cette proximité qui le rend si attachant.
Jean Jordy
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Publié le 29/03/2018 à 19:22, mis à jour le 04/05/2020 à 16:18.