Tharaud

Bach
CD Erato

Dans cet opus consacré à Jean-Sébastien Bach, le pianiste Alexandre Tharaud renoue avec la tradition des transcriptions: 7 réalisées par ses soins, 2 signées de Jean Wiener et une de Bach (l’adagio du concerto pour hautbois en ré mineur d’Alessandro Marcello), opus qui comporte également quelques œuvres originales pour clavier.
L’adagio du concerto de Marcello, version revisitée, magnifique et très émouvante nous tire les larmes grâce à une main droite qui dessine une ligne mélodique très chantante, proche de la voix humaine.
Ces adaptations , fait remarquable, n’ont pas à rougir de la comparaison avec l’œuvre originale comme en témoigne le puissant Chorus "Herr, unser Herrscher" de la Passion selon Saint-Jean. L’usage de la pédale, le jeu des résonances et la transcription hautement polyphonique réinventent ce chœur avec un crescendo final poignant.
Alexandre Tharaud interprète la célèbre Sicilienne de la sonate en mi b majeur pour flûte et clavecin (transcription du pianiste) avec une régularité métronomique qui n’enlève rien au lyrisme. Son toucher subtil fera merveille dans l’Aria de la Suite pour orchestre 3 en ré. Sa transcription sublime cette page grâce à la vision très orchestrale du piano, exploitant au mieux les différents registres dont le medium souvent négligé.
La Suite pour luth en mi mineur BWV 996 (sans Courante) dont la Bourrée est ici séparée des autres danses, offre un réel divertissement.
Parmi les partitions originales, nous retiendrons la Fantaisie et fugue en ut mineur BWV 906 avec son jeu perlé et la virtuosité de ses triolets de doubles croches cependant rigoureusement réguliers, suggérant, telle une tarentelle endiablée, une grande liberté d’expression.
la Suite pour clavier en la mineur BWV 818, éclipsée par ses grandes sœurs Françaises et Anglaises méritait d’être présentée dans ce florilège de pièces du cantor de Leipzig.
Quelques préludes extraits du petit livre de Wilhem Friedmann Bach ou des préludes et fughettes, dont le fameux prélude en do mineur BWV 999 ici très enlevé, parsèment cet enregistrement.
L’interprète remet à l’honneur l’Ave Maria de Charles Gounod sur le 1e prélude de Bach (clavier bien tempéré) , un texte souvent galvaudé. Ici, cette partition hommage à Bach retrouve toute sa spiritualité avec une ligne de chant remarquablement éthérée.
Alexandre Tharaud nous livre un enregistrement magistral qui excite la curiosité par l’originalité des transcriptions et par la variété d’un programme judicieusement pensé. Nous retrouvons sa sensibilité et son intégrité musicales: une combinaison magique!

Anne Grafteaux-Géli
Publié le 03/03/2025 à 21:48.