Halle aux grains
> 1er février

Tragédie et sentiments

Orchestre National du Capitole de Toulouse
Tugan Sokhiev, direction


Œuvre du début du XXè siècle, la sixième symphonie de Gustav Mahler annonce bien des cataclysmes à venir. Caractérisée par la violence qu elle déchaîne et par l’énergie qu’elle dégage, elle n’a rien d’un long fleuve tranquille, mais au contraire, ressemble à un dévastateur torrent de lave en fusion.
Tugan Sokhiev et son orchestre dans l’Allegro energico ma non troppo initial créent un véritable magma sonore où, parfois, la lisibilité de la ligne mélodique fait défaut. La montée en puissance semble, cependant, inexorable et les tensions se concentrent dans un climat de cruauté frémissante.
Comme avant lui John Barbirolli et, plus prés de nous, David Zinman, Tugan Sokhiev joue l’Andante avant le Scherzo (Mahler lui-même modifiera deux fois la succession de ces mouvements) . Là, dans cet Andante la profondeur du chant domine et le mouvement n’échappe jamais à son contrôle.
Dans le Scherzo, l’ardeur se mèle au tragique, et loin de tout hédonisme distant, c’est à une célébration orgiaque que nous assistons, elle même nourrie par les interventions quasi concertantes de tout l’orchestre où le premier violon Sergey Levitin, le hautboîste Olivier Stankiewicz, le corniste Jacques Deleplancque et les percusionnistes se mettent particulièrement en valeur.
L’Allegro moderato final est l’occasion d’une interprétation trés théâtrale (à l’image de l’emploi du trés kitschissime marteau en bois) où les différents climats sont idéalement contrastés, où les couleurs resplendissent et où le son n’est jamais forcé; nous entrevoyons là un intangible mystère entretenu par la somptueuse narration de l’orchestre et de celui qui le dirige.
Mystère qui ne peut s’ouvrir que sur le triomphe final.

Jean-Félix Marquette
Publié le 04/02/2013 à 14:40, mis à jour le 26/01/2019 à 19:35.