Caligula
Festival de Sablé
Le poème Harmonique. Direction: Vincent Dumestre.
Marionnettes Mimo Cuticchio
Cosi va, cosi va la vita
Le festival de Sablé sous la nouvelle direction artistique d’Alice Orange s’ouvre encore davantage aux arts connexes, ce soir les délicates marionnettes Siciliennes, Puppi, à tige de fer et têtes de bois ont créé l’événement. Ce nouveau spectacle particulièrement original est construit sur une magnifique idée de Vincent Dumestre. Explorateur des affetti du XVIIè que l’on sait, il avait déjà en février monté une nouvelle production à l’Opéra Comique du très rare Egisto de Cavalli contenant une fascinante scène de folie. Cette fois il ne s’agit pas de monter un opéra mais de la parfaite réalisation d’un Pasticcio plein d’esprit, d’humour et de poésie. Le spectacle est magique emportant le spectateur dans un autre monde.
C’est d’ailleurs une trop grande richesse qui pourrait déranger car de toute évidence c’est à la revoyure que ce spectacle unique prendra toute sa saveur. Le centre culturel de Sablé sur Sarthe est une belle salle en amphithéâtre avec sièges de bois capitonnés. Le confort physique et auditif se renforcent mutuellement. Les 7 musiciens du Poème Harmonique sont au milieu du public, Vincent Dumestre au théorbe les dirige en étant de trois quart dos au public. Le cercle amical ainsi formé permet une circulation des regards et une complicité de tous les instants, le chef assurant le contact avec la scène, qui est sur deux niveaux. Un tréteau laqué noir supporte les décors et les marionnettistes. Vêtus de noir il est possible de les oublier au profit des marionnettes d’une hauteur d’environ 1 mètre. Des chanteurs tout de noir vêtus à côté du tréteau, seuls les admirables visages sont dans la lumière. Enfin le texte est traduit dans un cartouche tout au fond. La complexité du dispositif, son habileté permettent un voyage dans le temps et l’espace, l’oeil passant de l’un à l’autre sans fatigue. Plusieurs spectacles s’enchevêtrent et les yeux mangent un peu les oreilles. Car si ce que nous voyons est hors du commun, la musique de Giovanni Pagliardi (1637-1702) développe le style cavallien avec de riches harmoniques, des ariosi sublimes et un récitar cantando d’une souplesse admirable. Le Pasticcio réalisé par Vincent Dumestre permet de comprendre les ressorts psychologiques de l’action. Ainsi la folie de Caligula contamine son entourage au retour des horreurs de la guerre pour porter le conflit dans les couples et les coeurs et après bien des malheurs chacun se repositionne ensuite. La lieta fine est belle mais les affres de l’amour et de la jalousie et les manipulations amoureuses et politiques sont porteurs de merveilles d’émotions. Les musiciens sont d’une grande subtilité et les chanteurs enthousiastes s’engagent dans cette aventure qui leur refuse de jouer, avec intelligence et audace. Toutes les voix son belles dans un travail d’équipe de tous les instants. La communication aux divers niveaux est parfaite, les chanteurs regardant parfois les marionnettes pour créer une magie troublante. Nous citerons au risque d’être injuste Caroline Meng pour son impératrice flamboyante à la voix ronde et fruitée ample et nuancée et Serge Goubioud spécialiste des rôles de caractère (et ici qu’elle nourrice!) qui ne travestit pas sa voix pour l’arioso le plus troublant qui pourrait servir de mot du jour: cosi va, cosi va la vita!
Les décors sont d’une simplicité et d’une beauté sidérantes. Quelques étoffes de soieries recouvrant les panneaux au besoin créèrent nuit ou mer à volonté. Les trouvailles de mise en scène d’Alexandra Rübner sont au même niveau d’originalité avec le changement de tête de Caligula pour signifier sa folie avec des yeux de verres étincelants de sauvagerie. Les lumières concèdent aux bougies ce qui’il faut de nuit avec un soutien moderne bien venu.
À Sablé l’esprit baroque des arts mêlés à soufflé grâce au Poème Harmonique en état de grâce et des marionnettistes de la compagnie Figli d’Arte - Mimmo Cuttichio inoubliables.
Hubert Stoecklin
Marionnettes Mimo Cuticchio
Cosi va, cosi va la vita
Le festival de Sablé sous la nouvelle direction artistique d’Alice Orange s’ouvre encore davantage aux arts connexes, ce soir les délicates marionnettes Siciliennes, Puppi, à tige de fer et têtes de bois ont créé l’événement. Ce nouveau spectacle particulièrement original est construit sur une magnifique idée de Vincent Dumestre. Explorateur des affetti du XVIIè que l’on sait, il avait déjà en février monté une nouvelle production à l’Opéra Comique du très rare Egisto de Cavalli contenant une fascinante scène de folie. Cette fois il ne s’agit pas de monter un opéra mais de la parfaite réalisation d’un Pasticcio plein d’esprit, d’humour et de poésie. Le spectacle est magique emportant le spectateur dans un autre monde.
C’est d’ailleurs une trop grande richesse qui pourrait déranger car de toute évidence c’est à la revoyure que ce spectacle unique prendra toute sa saveur. Le centre culturel de Sablé sur Sarthe est une belle salle en amphithéâtre avec sièges de bois capitonnés. Le confort physique et auditif se renforcent mutuellement. Les 7 musiciens du Poème Harmonique sont au milieu du public, Vincent Dumestre au théorbe les dirige en étant de trois quart dos au public. Le cercle amical ainsi formé permet une circulation des regards et une complicité de tous les instants, le chef assurant le contact avec la scène, qui est sur deux niveaux. Un tréteau laqué noir supporte les décors et les marionnettistes. Vêtus de noir il est possible de les oublier au profit des marionnettes d’une hauteur d’environ 1 mètre. Des chanteurs tout de noir vêtus à côté du tréteau, seuls les admirables visages sont dans la lumière. Enfin le texte est traduit dans un cartouche tout au fond. La complexité du dispositif, son habileté permettent un voyage dans le temps et l’espace, l’oeil passant de l’un à l’autre sans fatigue. Plusieurs spectacles s’enchevêtrent et les yeux mangent un peu les oreilles. Car si ce que nous voyons est hors du commun, la musique de Giovanni Pagliardi (1637-1702) développe le style cavallien avec de riches harmoniques, des ariosi sublimes et un récitar cantando d’une souplesse admirable. Le Pasticcio réalisé par Vincent Dumestre permet de comprendre les ressorts psychologiques de l’action. Ainsi la folie de Caligula contamine son entourage au retour des horreurs de la guerre pour porter le conflit dans les couples et les coeurs et après bien des malheurs chacun se repositionne ensuite. La lieta fine est belle mais les affres de l’amour et de la jalousie et les manipulations amoureuses et politiques sont porteurs de merveilles d’émotions. Les musiciens sont d’une grande subtilité et les chanteurs enthousiastes s’engagent dans cette aventure qui leur refuse de jouer, avec intelligence et audace. Toutes les voix son belles dans un travail d’équipe de tous les instants. La communication aux divers niveaux est parfaite, les chanteurs regardant parfois les marionnettes pour créer une magie troublante. Nous citerons au risque d’être injuste Caroline Meng pour son impératrice flamboyante à la voix ronde et fruitée ample et nuancée et Serge Goubioud spécialiste des rôles de caractère (et ici qu’elle nourrice!) qui ne travestit pas sa voix pour l’arioso le plus troublant qui pourrait servir de mot du jour: cosi va, cosi va la vita!
Les décors sont d’une simplicité et d’une beauté sidérantes. Quelques étoffes de soieries recouvrant les panneaux au besoin créèrent nuit ou mer à volonté. Les trouvailles de mise en scène d’Alexandra Rübner sont au même niveau d’originalité avec le changement de tête de Caligula pour signifier sa folie avec des yeux de verres étincelants de sauvagerie. Les lumières concèdent aux bougies ce qui’il faut de nuit avec un soutien moderne bien venu.
À Sablé l’esprit baroque des arts mêlés à soufflé grâce au Poème Harmonique en état de grâce et des marionnettistes de la compagnie Figli d’Arte - Mimmo Cuttichio inoubliables.
Hubert Stoecklin
Publié le 27/08/2012 à 09:24, mis à jour le 26/01/2019 à 19:35.