Deutsche Oper Berlin
> 6 mai

Traviata

Photos par Marcus Lieberenz/Deutsche Oper
Quelque vingt membres d’Utmisol ont passé le long week-end de l’Ascension à Berlin pour y voir La Traviata au Deutsche Oper et se régaler aussi de l’extraordinaire offre culturelle de la capitale allemande qui combine lieux historiques et quartiers d’ambiance porteurs de modernité et d’expériences en tous genres.
Sous la direction d’Ivan Tepulsic, le Deutsche Oper propose une superbe distribution, malgré des modifications. Remplaçant Diana Damrau souffrante, Patrizia Ciofi, qui a interprété le rôle maintes fois, est une Violetta bouleversante: dès le premier acte, sa voix apparaît d’une extrême richesse, porteuse d’émotions subtiles, qu’elle maîtrise parfaitement. A cela s’ajoute un excellent jeu scénique qui donne beaucoup d’épaisseur à son personnage dans des registres très variés, qu’elle exprime le bonheur ou au contraire la douleur ou le désespoir. Saimir Pirgu est un Alfredo plus pâle: sa voix n’a pas la même ampleur et, peut-être volontairement, le metteur en scène a mis l’accent sur sa faiblesse de caractère; il se met en position fœtale roulé dans une couverture lorsqu’il apprend le départ de Violetta; on le retrouve aussi fragile et désemparé quand il comprend que Violetta va mourir; il n’avait pas résisté à son père incarné de manière magistrale par Thomas Hampson. Celui-ci est parfait tant vocalement que scéniquement. Il est LE père qui décide et impose selon sa vision des choses. Le metteur en scène, dans un clin d’œil, fait apparaître sa fille comme une gamine qui passe à l’arrière-plan lorsqu’il rend visite à Violetta. On est à fond dans les poncifs de la société du XIXe siècle telle que le code civil de 1804 l’avait façonnée. Les hommes s’en sortent plus ou moins bien, les femmes sont largement instrumentalisées et elles paient souvent de leur vie. Madame de Raynal meurt de langueur, Madame Bovary se suicide, Violetta alias la Dame aux Camélias meurt de la tuberculose.
Les personnages secondaires ne déparent pas le trio principal, le Baron, Dong-Hwan Lee, a pour sa part une présence particulière.
Pour l’essentiel classique, la mise en scène est très réussie. Les décors sont sobres, suggèrent simplement une ambiance révélatrice en filigrane d’une réalité sociale et, tandis qu’un soin particulier a présidé au choix des costumes somptueux pour tous, qu’il s’agisse des protagonistes directs ou des personnages de passage comme la troupe des Espagnols; leur passage est prétexte à une corrida d’opérette avec des sièges et une Flora fort androgyne qui joue au taureau avec drôlerie.
Bref, une soirée magnifique!

Danielle Anex-Cabanis
Publié le 12/05/2016 à 23:00, mis à jour le 26/01/2019 à 19:35.